Le Sine Saloum
Le Sine Saloum est une région au sud de la Petite-côte du Sénégal. C’est un delta formé par la confluence des fleuves Siné et Saloum. Cependant, les fleuves ayant un débit très lent, c’est aussi un bras de mer qui s’enfonce profondément dans les terres. Le seul moyen de se déplacer d’île en île est la pirogue. Le transport via ce moyen est la principale activité économique avec la pêche. Du fait de sa géographie particulière, le Sine-saloum est très isolé et très pauvre. Il a longtemps été protégé, les navigateurs européens redoutant les mouvements des bancs de sable à son entrée. La vie y est donc encore très traditionnelle.
La mission
C’est une mission scolaire pour la Case des Touts Petits du village de Thiallane, à près de 3 heures de pirogue de la première route.
Dès notre arrivée à Dakar je prends donc contact avec Lissa, l’institutrice afin de fixer un rendez-vous pour aller faire les courses dont elle a besoin pour sa classe. Date est prise pour le lundi. C’est le lendemain du WE de fête de Touba, Dakar est littéralement vide est c’est vraiment plus aisé de se déplacer en taxi.
Lissa est venue avec sa sœur Olly. Je compte sur elles pour m’aider à négocier les prix pour afin d’acheter le maximum de matériel pour les enfants du Saloum avec notre cagnotte.
Lissa m’explique qu’elle a une classe de 64 enfants de 3 à 5 ans au sein de l’école de Thiallane. Cela fait 3 ans qu’elle travaille avec eux avec seulement 2 nattes, un tableau noir et quelques chaises apportées par les familles.
Nous achetons donc d’abord une vingtaine de chaises, 4 tables de jardin dont nous ferons couper les pieds pour les mettre à la bonne hauteur. 2 immenses nattes qui remplaceront les vieilles carrément défraîchies. Nous trouvons aussi divers jouets en bois qui semblent bien adaptés à l’âge des enfants et qui plaisent à Lissa (labyrinthe, pêche à la ligne, puzzle, etc…) Enfin nous achetons des cahiers de graphisme et de mathématiques pour chaque âge ainsi que des feuilles blanches pour les photocopier. Nous prenons également des crayons à papiers, des gommes, des baguettes pour apprendre à dénombrer, des crayons de couleurs et des pastels pour les plus petits.
Nous rentrons donc au CVD (Centre de Voile de Dakar) et convenons que Lissa nous rejoindra le soir avec sa fille, Maïmouna, âgée de 6 ans pour embarquer ensemble pour le Saloum. Après une navigation de nuit au moteur, nous arrivons en milieu de matinée à la passe de Djeffer, juste à temps pour la marée. Nous passons le chenal sans problème et retrouvons Seydou du côté de Djinda. Sa présence est bien utile puisque malgré la marée favorable, notre sondeur nous alerte une ou deux fois. Nos deux mètres de tirant d’eau passent parfois à seulement 30cm du fond, mais ça passe !
Nous arrivons vers 16h à Thiallane et débarquons aussitôt toute notre cargaison.
Les enfants sont pressés d’installer la classe et nous avons hâte de faire connaissance avec la famille de Lissa et son village. Après un petit brin de ménage et l’aide de toute la famille, la classe est installée. L’institutrice semble heureuse même si sa pudeur rend ses émotions difficilement perceptibles. Mais elle me dit à plusieurs reprises qu’elle est « tellement contente ».
Notre mission est remplie mais voici le récit du reste de notre séjour à Thiallane.
Thiallane et son accueil
Le lendemain l’école commence à 8h00. Médéric rejoint la classe de CM1/CM2 avec enthousiasme mais c’est plus dur pour Augustine en CE1/CE2. Elle est très impressionnée par le grand nombre d’élèves, par l’agitation de la classe dès que le maître tourne les talons et par toutes ces paires d’yeux rivés sur elles. De plus les enfants lui répètent en boucle « Comment t’appelles-tu ? Où habites-tu ? » les questions bien apprises de leurs leçons de Français ! Cette notoriété soudaine semble la mettre mal à l’aise. Mais après quelques larmes rapidement consolées par la présence de son frère, elle suit la classe toute la matinée. Même le cours d’arabe où elle ne comprend quand même pas grand-chose. Elle rentre le soir en nous disant que le professeur d’arabe doit beaucoup aimer le chocolat parce qu’il a passé tout le cours à dire « chocolat, chocolat ! » (en fait « inch’allah !!! »😄)
Alix a courageusement décidé d’aller aider Lissa dans sa classe. Elle effectue ainsi un mini stage professionnel ! Ceci simplifie bien l’intégration de Zélie 5 ans. A la récréation, elle donne aux instituteurs les balles de tennis que nous avons transportées pour VSF, données par la Fédération Française de Tennis. C’est le bonheur ! Tous les enfants crient son nom pour recevoir une balle et elle les lance tous azimut pour la plus grande joie de tous. C’est un cadeau qui semble faire très plaisir à tout le monde. C’est sans doute plus adapté qu’un ballon de foot parce que ça permet à tous de toucher la balle plus souvent !
Pour nous la matinée a été bien calme sur SEA YOU où nous avons pu avancer nos différents travaux de rédaction. Après la classe nous retrouvons les enfants à l’école et Lissa nous invite à venir manger un Tié bou Diem chez elle. Quand on se promène dans le village, on entend de toute part « Augustine ! » « Médérrrric !» C’est vraiment sympa de se sentir si bien accueillis par tout le village ! On nous interpelle chaleureusement « he Toubab ! » Et nous commençons à apprendre quelques mots de salutation. « Bonjour » d’abord, mais ça c’est plutôt facile ! Après vient toute la série des « comment ça va ? Ca va bien. Et la famille ? Elle va bien. Et les enfants ? Ils sont là. » Après quelques jours ça ressemble presque à un test à chaque rencontre, et nous nous prenons au jeu avec plaisir ! Nous sentons que tout le monde est heureux de nous voir faire des efforts pour parler Sererre.
Pour plus d’aisance je me suis fait faire un porte-bébé façon sénégalaise à Dakar et je porte donc Ysance dans mon dos. Je me rends compte que cela permet un contact simple et chaleureux avec les femmes de village. Heureuses, elle me considèrent comme une vrai sénégalaise, avec un bébé dans le dos et plein d’enfants autour de moi !
Lissa nous reçoit chaque jour chez elle après la classe. Après le repas que nous prenons dans son salon pendant qu’elle mange avec sa famille dans la cuisine, elle nous emmène visiter Thiallane. Il nous faut pas moins de 3 après-midis pour rencontrer tous les gens importants : L’imam, le chef du village, le père du footballeur bordelais Lamine Diatta, les nombreux oncles et tantes de Lissa, ses frères etc…
Lissa tiens absolument à nous remercier de tout ce que nous avons apporté. Elle nous fait de nombreux cadeaux : des éventails sénégalais, une tenue sénégalaise pour chacun et des repas pour toute la famille. Nous sommes un peu gênés de peser sur elle avec notre grande famille et ce n’est pas facile de lui rendre la pareille pour tout ce qu’elle nous offre. Nous offrirons seulement quelques pommes achetées à Dakar ; un gros gâteau au chocolat, un petit maillot pour Maïmouna et une huile pour le corps. Heureusement il y a quelques jours fériés où nous vaquons à nos occupations dans le Saloum et où nous ne pesons pas sur elle.
Le poste de santé de Bassar
Avant de quitter le village nous passons à Bassar visiter le poste de santé. Nous sommes accueillis par la matrone qui travaille ici depuis 1974. Pas toute jeune, elle porte quand même un tout petit bébé sur son dos. Elle m’explique que c’est son arrière-petit-fils ! Nous faisons le tour du poste de santé qui est certes bien organisé et certainement très utile pour les villages alentour. Cependant, comme sage-femme européenne, je reste impressionnée par le manque d’hygiène et de médicaments. Il y a bien des lavabos dans les salles d’examen mais ils sont pleins de dossiers. L’eau courante est-elle seulement installée? Je visite aussi la salle de naissance qui a bien servi durant le week-end. Encore une fois, le minimum est présent mais je vois bien que les conditions sont assez spartiates. Je me renseigne sur la conduite à tenir en cas de complication. Il faut aller à Foungdioun, à 2 heures de pirogue. Si Ysance était née ici, nous serions sans doute plus là toutes les deux…
Après une semaine passée au village nous décidons quand même de nous éloigner un peu dans le bolong (petit bras de mer dans le delta). Nous sommes bien tristes de quitter les habitants de Thiallane mais riches de ces rencontres incroyables que nous ont offert cette mission VSF. Nous sommes bien conscients que c’est grâce à la générosité de nos donateurs que nous avons pu apporter tant de choses dans la classe et ainsi faire plaisir au village tout entier.
L’heure Sénégalaise
C’est la semaine de la Toussaint. Nous entreprenons donc de nous rendre à Mar Lodj pour la messe de 10h. c’est le seul village du Saloum à abriter une communauté catholique (le Senegal est Musulman à près de 95%). On est jeudi, nous pourrons donc profiter de la pirogue commune du village qui part à 8h. Enfin… peut-être 7h, ce n’est pas très fixe, nous découvrons là l’horaire sénégalais ! Nous sommes donc tous prêts à 7h le jeudi matin, mais la pirogue ne partira qu’à 8h20 ! A la grâce de Dieu ! Personne ne pense à rouspéter ou à se plaindre, on est loin de l’ambiance des transports en commun parisiens !!! C’est une philosophie de vie qui peut nous servir d’exemple. Nous faisons la connaissance de Noah, un jeune homme de 20 ans qui a fait sa scolarité à Thiallane et fait maintenant ses études à Dakar. Nous avons de longs échanges avec lui et il nous aide à mieux comprendre la situation du Sénégal, c’est très enrichissant.
Arrivés à Mar Lodj à 10h20, nous sautons dans une charrette tirée par un âne. Sacré périple ! Nous retrouvons nos amis de Cattleya et les emmenons déjeuner chez Anne-Marie. C’est la sœur Thérèse avec qui nous avons pris contact qui nous a orientés vers elle. Elle nous prépare un délicieux Yassa de cochon, un vrai repas chrétien en ces terres musulmanes.
Vincent et les grands on aussi l’occasion un soir d’assister à la final du tournoi de lutte Sénégalaise à Djinda. Prévoir 3 heure de retard pour le début des festivités 😁. La lutte est le sport national au Sénagal. Il est à mi chemin avec la religion. Les rituels et les gris-gris font partie intégrante du sport. Le tout rythmé par une musique envoûtante. Cette expérience est vraiment marquante. Ils sont les seuls blancs dans l’arène, et ont vraiment l’impression d’être les spectateurs privilégiés d’une cérémonie tribale ancestrale.
Merci donc à chacun de vous pour votre participation à cette aventure humaine si riche !
– Olivia